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Read book online «Le Vingtième Siècle: La Vie Électrique by Albert Robida (reading fiction txt) 📕».   Author   -   Albert Robida



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Montmorency; ce fut un doux malin, un combattant de l'intelligence qui sut pr�lever sur des cr�atures inf�rieures la d�me de l'intelligence.....

—Deux ou trois cent mille actions de 5,000 francs, n'est-ce pas, dans vos derni�res affaires?

—Plus quelques petites choses, pour compenser les frais tr�s s�rieux... Je reprends! Voici ce qu'ils diront, les historiens: Il sut pr�lever la d�me de l'intelligence et vint, apportant la richesse en notre belle province, fonder une illustre maison, planter l'arbre seigneurial dont les rameaux s'�tendent aujourd'hui si largement, abritant nos t�tes sous leur ombre, et contribuer puissamment au rel�vement des principes d'autorit� et des saines id�es de hi�rarchie sociale trop longtemps �branl�es par nos r�volutions..... Voil�! ainsi se fonde la nouvelle aristocratie!�

Et M. Pigott avait raison.

Sur les ruines bient�t d�blay�es de l'ancien monde, une aristocratie nouvelle se fonde. Que devient l'ancienne? Les vieilles races en d�cadence semblent fondre et dispara�tre de jour en jour avec plus de rapidit�. Nous voyons leurs descendants appauvris, �loign�s par la d�fiance des masses des affaires publiques, peu aptes � la pratique des sciences, impropres aux grandes affaires industrielles et commerciales, tirer la langue dans leurs ch�teaux d�labr�s, qu'ils ne peuvent entretenir et r�parer, ou v�g�ter dans de mis�rables petites places sans ouvertures d'avenir.

Leurs terres, leurs ch�teaux, et leurs noms m�mes avec, s'en vont � la nouvelle aristocratie, aux seigneurs des nouvelles couches, aux Cr�sus de la Bourse, enrichis par l'�pargne des autres, aux notabilit�s de la grande industrie ou de la productive politique, et, � c�t� de ces illustres d�bris heureux d'obtenir de maigres emplois en des bureaux de minist�re ou d'usine, o� le sang actif des anciens chevaucheurs croupit dans une stagnation lamentable, nous voyons tels grands industriels, gigantesques coffres-forts, planter le drapeau de Plutus sur les anciens domaines de l'ex-noblesse, reconstituer peu � peu les vastes fiefs d'autrefois sur des bases plus solides.

Quelques exemples, en outre de celui fourni par le milliardaire Pigott:

Le c�l�bre marquis Marius Capourl�s, fondateur d'une centaine d'usines, organisateur de syndicats accaparant toutes les f�culeries et distilleries d'une immense r�gion. Avec ses b�n�fices, dont il sait � peine le compte, Marius Capourl�s a peu � peu agglom�r� un noyau de vastes domaines comprenant l'�tendue d'un d�partement et r�cemment �rig�s en marquisat. Ajoutons bien vite que, parmi les simples petits commis d'une de ses agences, Marius Capourl�s compte un duc authentique, descendant des rois de Sicile et de J�rusalem, et trois ou quatre pauvres diables couverts de blasons, dont les p�res ont eu terres et ch�teaux, gard�, casque en t�te, des marches de fronti�res et arros� de leur sang tous les champs de bataille de l'ancienne France.

M. ARTHUR PIGOTT.

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M. Jules Pommard est non moins c�l�bre que le marquis Marius. Lanc� sur le terrain giboyeux de la politique, M. Jules Pommard n'est pas de ceux qui restent bredouilles. Il a eu des hauts et des bas; accus� jadis de trafics et de malversations, mais amnisti� par le succ�s, il s'est, apr�s avoir purg� quelques petites condamnations, taill� dans sa province un v�ritable petit royaume o� il tient tout, dirige tout, commande � tous et plane sur tous du haut de sa sereine majest� d'homme arriv�, qu'encadre noblement un grand ch�teau historique ayant fait partie du domaine royal, ch�teau dont il compte bien faire porter le nom � ses h�ritiers.

Voici une illustration plus haute encore, M. Malbousquet, autre grand industriel, roi du fer et prince de la fonte, ma�tre et possesseur de formidables �tablissements m�tallurgiques, propri�taire de tubes et de nombreuses lignes d'a�ronefs, � la t�te de trois cent mille ouvriers et du plus titanique outillage qu'il soit possible de r�ver, immense r�union d'engins terrifiants, grin�ant, tournant, virant, frappant, hurlant effroyablement en des usines monstres, colossales cit�s de fer aux architectures �tranges, o� les marteaux-pilons g�ants s'�l�vent comme d'extraordinaires monuments mobiles et f�roces, parmi des ouragans de vacarmes m�talliques et des tourbillons d'�cres fum�es, au-dessus de rouges fournaises attis�es par des cohues d'hommes h�ves et demi-nus, roussis, grill�s et charbonneux.

Le ma�tre de ce royaume, v�ritablement infernal, n'a garde de l'habiter; il domine de loin, il commande et dirige, loin de l'infernal mouvement, loin des rivi�res de fonte incandescente et des hauts fourneaux soufflant des haleines de feu; il r�gne sur ses esclaves de chair et de fer du fond d'un somptueux cabinet reli� par T�l� au cabinet de l'ing�nieur-directeur des usines, dans un castel resplendissant, grand comme Chambord et Coucy r�unis, �lev� � coups de millions dans un site charmant, avec un fleuve � ses pieds, filant vers la mer, et de belles for�ts, s�v�rement gard�es, se d�roulant aux divers horizons.

A perte de vue, tout ici appartient � M. Malbousquet, d�j� comte romain, devenu duc tout r�cemment, par la gr�ce du milliard; dans cette terre, �rig�e pour lui en duch� par les Chambres, tout est � lui, le sol et aussi les gens, tenus et brid�s par mille liens.

C'est pourtant le domaine actuel du roi du fer, le grand centre m�tallurgique qui fut, en 1922, le principal foyer de la r�volution sociale et qui vit, lors du triomphe momentan� des doctrines collectivistes, le plus complet bouleversement.

EXAMENS POUR LE DOCTORAT �S SCIENCES MILITAIRES

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Ici, pendant qu'une effroyable lutte �clatait � Paris, pendant que se d�roulaient des sc�nes de sauvagerie �pouvantables, o� le peuple �nerv� et hallucin�, dans l'impossibilit� de r�aliser les r�ves insens�s des r�volt�s et des utopistes, des na�fs farouches et des h�bleurs, accumulait ruines sur ruines et se ruait � la folie furieuse et � l'effondrement universel, pendant ce d�cha�nement de tous les d�lires, dans le grand centre m�tallurgique saisi au nom de la collectivit�, s'appliquaient � peu pr�s pacifiquement les th�ories socialistes.

EMBARCAD�RE DE L'H�TEL GEORGES LORRIS.

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Les meneurs, au jour du triomphe, avaient ici trouv� un organisme bien complet, en bon �tat de fonctionnement, et ils avaient pens� que tout devait continuer � marcher comme par le pass� et m�me beaucoup mieux, simplement par la bonne volont� de tous, moyennant la simple suppression des directeurs et des actionnaires, et le partage �gal entre tous du produit int�gral du travail de tous.

Le programme �tait simple, clair, � la port�e des moins larges intelligences, mais l'application, au grand �tonnement de chacun, donna lieu pourtant, d�s la premi�re heure, � de rudes frottements. L'�galit� des droits d�cr�t�e—la Sainte �galit�—pouvait-elle s'accommoder de l'in�galit� des fonctions et des travaux? On laissait les ing�nieurs � leurs travaux forc�ment, parce que le simple manœuvre ne pouvait songer � prendre leur place; mais les autres, bureaucrates, contrema�tres, chefs ouvriers, ne devaient-ils pas rentrer dans le rang? Comment proc�der � la distribution du travail, avec toutes ces in�galit�s, qui semblaient appara�tre pour la premi�re fois aux yeux de tous? Personne ne voulait plus du travail rude, du travail dangereux; chacun, naturellement, r�clama le travail le plus facile et le plus doux, les postes les plus tranquilles.

D�s le premier jour, les heurts violents se produisirent, les discussions �clat�rent et s'envenim�rent tr�s vite. Au milieu des tiraillements, des d�sordres et m�me des gr�ves de certaines sp�cialit�s, les usines march�rent quelque temps cahin-caha, d�vorant les stocks de minerais amass�s et les fonds saisis dans les caisses. Puis, brusquement, tout s'arr�ta, les machines pouss�rent leur dernier r�le, les hauts fourneaux s'�teignirent, tout tomba dans une confusion �pouvantable.

Le collectivisme mourait de son triomphe. Tant bien que mal, l'organisme qu'il avait trouv� en fonctions avait encore march� quelques semaines, produisant—suivant les comptes rigoureusement tenus par les bureaux—tout � perte, pour diverses causes, par suite de l'immense g�chis d'abord, du labeur mal conduit et mollement soutenu pendant les heures de travail diminu�es de moiti�,—et laissant, au lieu de fabuleux b�n�fices � r�partir, comme tous l'esp�raient, un d�ficit � combler, gouffre �norme, s'�largissant d'heure en heure.

Six mois d'anarchie �pouvantable, avec la tristesse am�re des beaux r�ves �croul�s, les lugubres d�sespoirs, les col�res impuissantes, avec la ruine, la fureur et la faim partout!

Le grand centre industriel resta comme un immense tas de ferrailles inutiles, autour duquel peu � peu la solitude se faisait et que les affam�s abandonnaient en colonnes lamentables.

Quand, apr�s bien d'autres catastrophes, l'anarchie de Paris, s'�teignant peu � peu dans le sang des sectes socialistes qui s'entre-d�voraient, fut �cras�e d�finitivement par un retour du bon sens, puissamment aid� par la force pass�e aux mains des meneurs satisfaits, gorg�s des d�pouilles de l'ancienne soci�t�, il n'y avait plus de d�sordres � r�primer dans le royaume du fer, il n'y avait plus que des ruines.

�douard Malbousquet, jeune alors, ex-petit ing�nieur des usines, riche de quelques petits b�n�fices recueillis dans l'eau trouble de la r�volution sociale, eut alors l'habilet� de grouper quelques amis parmi les nouveaux capitalistes �clos dans la tourmente et de racheter, pour un morceau de pain jet� aux actionnaires survivants, ces tristes ruines inutiles, et de tout recommencer.

La nouvelle f�odalit�: Monsieur le duc Malbousquet.

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Le r�sultat, le voici: tout en haut, le puissant seigneur suzerain; tout en bas, la tourbe des humbles vassaux; d'un c�t�, une haute personnalit� politique, financi�re et industrielle, combl�e de richesses, de titres et d'honneurs; et, de l'autre, la noire fourmili�re des travailleurs du fer, revenus au travail avec de la mis�re et de cruelles d�sillusions en plus.

Notre haute civilisation scientifique, l'exc�s du machinisme, l'industrialisme �crasant l'homme sous l'engin ou changeant cet homme, non pas en machine m�me, mais en simple fragment de rouage de machine, ont donc, en d�finitive, abouti � ramener le monde en arri�re et � cr�er au-dessus des masses travailleuses une nouvelle f�odalit�, aussi puissante, aussi orgueilleuse et aussi rude en sa domination que l'ancienne, si ce n'est plus!

Serfs des enfers industriels riv�s aux plus dures besognes, petits employ�s clou�s � leur pupitre, petits ing�nieurs, rouages un peu plus fins de la grande machine, petits commer�ants, lamin�s et broy�s par les gigantesques syndicats, paysans cultivant, suivant les nouvelles m�thodes scientifiques, la terre des nouveaux seigneurs, dites-nous si le sort des manants du Moyen �ge, des si�cles o� l'on avait au moins le temps de respirer, �tait plus rude que le v�tre?

Certes, la main humaine, m�me recouverte du gantelet de fer des hauts barons, le poing de la f�odalit� de fer �tait moins lourd que le marteau-pilon d'aujourd'hui, symbole �crasant de la nouvelle f�odalit� de l'or!...

Le petit h�tel achet� par M. Philox Lorris, � l'un de ces potentats de la finance et de l'industrie, avoisin� par d'autres h�tels d'un luxe babylonien, r�sidences urbaines appartenant � de non moins notables seigneurs, allait donc �tre transform� compl�tement pour le fils du grand ing�nieur; toutes les innovations, toutes les applications de la science moderne devaient y faire r�gner un confort scientifique absolument digne du si�cle �clair� o� nous avons le bonheur de vivre et du grand Philox Lorris lui-m�me.

FOR�TS D'APPARTEMENT.

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Il y avait naturellement tr�s peu de jardins, un simple cadre de verdure, sertissant les diff�rents b�timents,—l'espace est si mesur� � Paris!—mais on s'�tait rattrap� sur les terrasses, les petites plates-formes et les balcons suspendus, transform�s en v�ritables for�ts, en for�ts vues par le gros bout de la lorgnette, avec des arbres nains japonais suivant la mode actuelle.

LE SOL DE PARIS.

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Il n'y a pas que Paris qui soit �troit et resserr�, on se sent tellement press� aujourd'hui sur notre globe archi-plein, dans le coude � coude des continents bond�s, qu'il faut t�cher de gagner un peu de place, de toutes les fa�ons possibles, par d'ing�nieux subterfuges.

Voulez-vous des for�ts ombreuses avec de vieux ch�nes aux ramures puissantes, tordant leurs racines comme un nid de serpents et lan�ant au loin de grosses branches � l'�pais feuillage? Voulez-vous des pins fantastiques, h�riss�s de pointes et cramponn�s � des blocs de rochers moussus? Voulez-vous des arbres exotiques, des fourr�s �tranges, domin�s par des baobabs monstrueux?

En voici sur votre balcon, dans de jolis bacs de fa�ence japonaise, voici sur votre v�randa la for�t vivante en r�duction, les g�ants nains, les arbres centenaires, les colosses v�g�taux, maintenus, par l'art inou� du jardinier de Yeddo, � des proportions de plantes d'appartement.

C'est la for�t minuscule, mais c'est la for�t tout de m�me, avec ses fourr�s touffus, ses dessous tapiss�s de bruy�res naines, avec ses profondeurs myst�rieuses, qui vous donnent le vertige et le frisson des solitudes, avec ses rochers, ses ravins m�me, au-dessus desquels se dressent de vieux troncs d�pouill�s, tordus et d�chiquet�s par les si�cles, ravag�s par les ouragans; ce sont de vastes paysages factices, absolument illusionnants, devant lesquels, en y mettant un atome de bonne volont�, on peut chercher la po�sie du r�ve, tout comme si l'on errait dans les quelques coins de nature sauvage qui nous restent, �parpill�s �� et l� par le monde et sur le point de dispara�tre � jamais.

Ne cherchez pas d'autres feuill�es � Paris, en dehors de ces futaies factices et des maigres jardinets entretenus � grand'peine autour des maisons riches.

Le sol de Paris n'en peut gu�re

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