American library books » Fiction » Vingt mille Lieues Sous Les Mers — Complete by Jules Verne (simple ebook reader .txt) 📕

Read book online «Vingt mille Lieues Sous Les Mers — Complete by Jules Verne (simple ebook reader .txt) 📕».   Author   -   Jules Verne



1 ... 38 39 40 41 42 43 44 45 46 ... 69
Go to page:
immédiatement vers la surface de la mer, et ne reparut plus.

« Ne vous inquiĂ©tez pas, me dit le capitaine. C'est Nicolas, du cap Matapan, surnommĂ© le Pesce. Il est bien connu dans toutes les Cyclades. Un hardi plongeur ! L'eau est son Ă©lĂ©ment, et il y vit plus que sur terre, allant sans cesse d'une Ă®le Ă  l'autre et jusqu'Ă  la Crète.

— Vous le connaissez, capitaine ?

— Pourquoi pas, monsieur Aronnax ? Â»

Cela dit, le capitaine Nemo se dirigea vers un meuble placé près du panneau gauche du salon. Près de ce meuble, je vis un coffre cerclé de fer, dont le couvercle portait sur une plaque de cuivre le chiffre du Nautilus, avec sa devise Mobilis in mobile.

En ce moment, le capitaine, sans se préoccuper de ma présence, ouvrit le meuble, sorte de coffre-fort qui renfermait un grand nombre de lingots.

C'Ă©taient des lingots d'or. D'oĂą venait ce prĂ©cieux mĂ©tal qui reprĂ©sentait une somme Ă©norme ? OĂą le capitaine recueillait-il cet or, et qu'allait-il faire de celui-ci ?

Je ne prononçai pas un mot. Je regardai. Le capitaine Nemo prit un à un ces lingots et les rangea méthodiquement dans le coffre qu'il remplit entièrement. J'estimai qu'il contenait alors plus de mille kilogrammes d'or, c'est-à-dire près de cinq millions de francs.

Le coffre fut solidement fermé, et le capitaine écrivit sur son couvercle une adresse en caractères qui devaient appartenir au grec moderne.

Ceci fait, le capitaine Nemo pressa un bouton dont le fil correspondait avec le poste de l'équipage. Quatre homme parurent, et non sans peine ils poussèrent le coffre hors du salon. Puis, j'entendis qu'ils le hissaient au moyen de palans sur l'escalier de fer.

En ce moment, le capitaine Nemo se tourna vers moi :

« Et vous disiez, monsieur le professeur ? me demanda-t-il.

— Je ne disais rien, capitaine.

— Alors, monsieur, vous me permettrez de vous souhaiter le bonsoir. Â»

Et sur ce, le capitaine Nemo quitta le salon.

Je rentrai dans ma chambre très intrigué, on le conçoit. J'essayai vainement de dormir. Je cherchais une relation entre l'apparition de ce plongeur et ce coffre rempli d'or. Bientôt, je sentis à certains mouvements de roulis et de tangage, que le Nautilus quittant les couches inférieures revenait à la surface des eaux.

Puis, j'entendis un bruit de pas sur la plate-forme. Je compris que l'on détachait le canot, qu'on le lançait à la mer. Il heurta un instant les flancs du Nautilus, et tout bruit cessa.

Deux heures après, le même bruit, les mêmes allées et venues se reproduisaient. L'embarcation, hissée à bord, était rajustée dans son alvéole, et le Nautilus se replongeait sous les flots.

Ainsi donc, ces millions avaient Ă©tĂ© transportĂ©s Ă  leur adresse. Sur quel point du continent ? Quel Ă©tait le correspondant du capitaine Nemo ?

Le lendemain, je racontai à Conseil et au Canadien les événements de cette nuit, qui surexcitaient ma curiosité au plus haut point. Mes compagnons ne furent pas moins surpris que moi.

« Mais oĂą prend-il ces millions ? Â» demanda Ned Land.

A cela, pas de réponse possible. Je me rendis au salon après avoir déjeuné, et je me mis au travail. Jusqu'à cinq heures du soir, je rédigeai mes notes. En ce moment — devais-je l'attribuer à une disposition personnelle — je sentis une chaleur extrême, et je dus enlever mon vêtement de byssus. Effet incompréhensible, car nous n'étions pas sous de hautes latitudes, et d'ailleurs le Nautilus, immergé, ne devait éprouver aucune élévation de température. Je regardai le manomètre. Il marquait une profondeur de soixante pieds, à laquelle la chaleur atmosphérique n'aurait pu atteindre.

Je continuai mon travail, mais la température s'éleva au point de devenir intolérable.

« Est-ce que le feu serait Ă  bord ? Â» me demandai-je.

J'allais quitter le salon, quand le capitaine Nemo entra. Il s'approcha du thermomètre, le consulta, et se retournant vers moi :

« Quarante-deux degrĂ©s, dit-il.

— Je m'en aperçois, capitaine, répondis-je, et pour peu que cette chaleur augmente, nous ne pourrons la supporter.

— Oh ! monsieur le professeur, cette chaleur n'augmentera que si nous le voulons bien.

— Vous pouvez donc la modĂ©rer Ă  votre grĂ© ?

— Non, mais je puis m'éloigner du foyer qui la produit.

— Elle est donc extĂ©rieure ?

— Sans doute. Nous flottons dans un courant d'eau bouillante.

— Est-il possible ? m'Ă©criai-je.

— Regardez. Â»

Les panneaux s'ouvrirent, et je vis la mer entièrement blanche autour du Nautilus. Une fumée de vapeurs sulfureuses se déroulait au milieu des flots qui bouillonnaient comme l'eau d'une chaudière. J'appuyai ma main sur une des vitres, mais la chaleur était telle que je dus la retirer.

« OĂą sommes-nous ? demandai-je.

— Près de l'île Santorin, monsieur le professeur, me répondit le capitaine, et précisément dans ce canal qui sépare Néa-Kamenni de Paléa-Kamenni. J'ai voulu vous donner le curieux spectacle d'une éruption sous-marine.

Je croyais, dis-je, que la formation de ces îles nouvelles était terminée.

— Rien n'est jamais terminé dans les parages volcaniques, répondit le capitaine Nemo, et le globe y est toujours travaillé par les feux souterrains. Déjà, en l'an dix-neuf de notre ère, suivant Cassiodore et Pline, une île nouvelle, Théia la divine, apparut à la place même où se sont récemment formés ces îlots. Puis, elle s'abîma sous les flots, pour se remontrer en l'an soixante-neuf et s'abîmer encore une fois. Depuis cette époque jusqu'à nos jours, le travail plutonien fut suspendu. Mais, le 3 février 1866, un nouvel îlot, qu'on nomma l'îlot de George, émergea au milieu des vapeurs sulfureuses, près de Néa-Kamenni, et s'y souda, le 6 du même mois. Sept jours après, le 13 février, l'îlot Aphroessa parut, laissant entre Néa-Kamenni et lui un canal de dix mètres. J'étais dans ces mers quand le phénomène se produisit, et j'ai pu en observer toutes les phases. L'îlot Aphroessa, de forme arrondie, mesurait trois cents pieds de diamètre sur trente pieds de hauteur. Il se composait de laves noires et vitreuses, mêlées de fragments feldspathiques. Enfin, le 10 mars, un îlot plus petit, appelé Réka, se montra près de Néa-Kamenni, et depuis lors, ces trois îlots, soudés ensemble, ne forment plus qu'une seule et même île.

— Et le canal oĂą nous sommes en ce moment ? demandai-je.

— Le voici, répondit le capitaine Nemo, en me montrant une carte de l'Archipel. Vous voyez que j'y ai porté les nouveaux îlots.

— Mais ce canal se comblera un jour ?

— C'est probable, monsieur Aronnax, car, depuis 1866, huit petits Ă®lots de lave ont surgi en face du port Saint-Nicolas de PalĂ©a-Kamenni. Il est donc Ă©vident que NĂ©a et PalĂ©a se rĂ©uniront dans un temps rapprochĂ©. Si, au milieu du Pacifique, ce sont les infusoires qui forment les continents, ici, ce sont les phĂ©nomènes Ă©ruptifs. Voyez, monsieur, voyez le travail qui s'accomplit sous ces flots. Â»

Je revins vers la vitre. Le Nautilus ne marchait plus. La chaleur devenait intolérable. De blanche qu'elle était, la mer se faisait rouge, coloration due à la présence d'un sel de fer. Malgré l'hermétique fermeture du salon, une odeur sulfureuse insupportable se dégageait, et j'apercevais des flammes écarlates dont la vivacité tuait l'éclat de l'électricité.

J'Ă©tais en nage, j'Ă©touffais, j'allais cuire. Oui, en vĂ©ritĂ©, je me sentais cuire !

« On ne peut rester plus longtemps dans cette eau bouillante, dis-je au capitaine.

— Non, ce ne serait pas prudent Â», rĂ©pondit l'impassible Nemo.

Un ordre fut donné. Le Nautilus vira de bord et s'éloigna de cette fournaise qu'il ne pouvait impunément braver. Un quart d'heure plus tard, nous respirions à la surface des flots.

La pensée me vint alors que si Ned Land avait choisi ces parages pour effectuer notre fuite, nous ne serions pas sortis vivants de cette mer de feu.

Le lendemain, 16 février, nous quittions ce bassin qui, entre Rhodes et Alexandrie, compte des profondeurs de trois mille mètres, et le Nautilus passant au large de Cerigo, abandonnait l'archipel grec, après avoir doublé le cap Matapan.

VII LA MÉDITERRANÉE EN QUARANTE-HUIT HEURES

La MĂ©diterranĂ©e, la mer bleue par excellence, la « grande mer Â» des HĂ©breux, la « mer Â» des Grecs, le « mare nostrum Â» des Romains, bordĂ©e d'orangers, d'aloès, de cactus, de pins maritimes, embaumĂ©e du parfum des myrtes, encadrĂ©e de rudes montagnes, saturĂ©e d'un air pur et transparent, mais incessamment travaillĂ©e par les feux de la terre, est un vĂ©ritable monde. C'est lĂ , sur ses rivages et sur ses eaux, dit Michelet, que l'homme se retrempe dans l'un des plus puissants climats du globe.

Mais si beau qu'il soit, je n'ai pu prendre qu'un aperçu rapide de ce bassin, dont la superficie couvre deux millions de kilomètres carrés. Les connaissances personnelles du capitaine Nemo me firent même défaut, car l'énigmatique personnage ne parut pas une seule fois pendant cette traversée à grande vitesse. J'estime à six cents lieues environ le chemin que le Nautilus parcourut sous les flots de cette mer, et ce voyage, il l'accomplit en deux fois vingt-quatre heures. Partis le matin du 16 février des parages de la Grèce, le 18, au soleil levant, nous avions franchi le détroit de Gibraltar.

— Il fut évident pour moi que cette Méditerranée, resserrée au milieu de ces terres qu'il voulait fuir, déplaisait au capitaine Nemo. Ses flots et ses brises lui rapportaient trop de souvenirs, sinon trop de regrets. Il n'avait plus ici cette liberté d'allures, cette indépendance de manœuvres que lui laissaient les océans, et son Nautilus se sentait à l'étroit entre ces rivages rapprochés de l'Afrique et de l'Europe.

Aussi, notre vitesse fut-elle de vingt-cinq milles à l'heure, soit douze lieues de quatre kilomètres. Il va sans dire que Ned Land, à son grand ennui, dut renoncer à ses projets de fuite. Il ne pouvait se servir du canot entraîné à raison de douze à treize mètres par seconde. Quitter le Nautilus dans ces conditions, c'eût été sauter d'un train marchant avec cette rapidité, manœuvre imprudente s'il en fut. D'ailleurs, notre appareil ne remontait que la nuit à la surface des flots, afin de renouveler sa provision d'air, et il se dirigeait seulement suivant les indications de la boussole et les relèvements du loch.

Je ne vis donc de l'intérieur de cette Méditerranée que ce que le voyageur d'un express aperçoit du paysage qui fuit devant ses yeux, c'est-à-dire les horizons lointains, et non les premiers plans qui passent comme un éclair. Cependant, Conseil et moi, nous pûmes observer quelques-uns de ces poissons méditerranéens, que la puissance de leurs nageoires maintenait quelques instants dans les eaux du Nautilus. Nous restions à l'affût devant les vitres du salon, et nos notes me permettent de refaire en quelques mots l'ichtyologie de cette mer.

Des divers poissons qui l'habitent, j'ai vu les uns, entrevu les autres, sans parler de ceux que la vitesse du Nautilus déroba à mes yeux. Qu'il me soit donc permis de les classer d'après cette classification fantaisiste. Elle rendra mieux mes rapides observations.

Au milieu de la masse des eaux vivement Ă©clairĂ©es par les nappes Ă©lectriques, serpentaient quelques-unes de ces lamproies longues d'un mètre, qui sont communes Ă  presque tous les climats. Des oxyrhinques, sortes de raies, larges de cinq pieds, au ventre blanc, au dos gris cendrĂ© et tachetĂ©, se dĂ©veloppaient comme de vastes châles emportĂ©s par les courants. D'autres raies passaient si vite que je ne pouvais reconnaĂ®tre si elles mĂ©ritaient ce nom d'aigles qui leur fut donnĂ© par les Grecs, ou ces qualifications de rat, de crapaud et de chauve-souris, dont les pĂŞcheurs modernes les ont affublĂ©es. Des squales-milandres, longs de douze pieds et particulièrement redoutĂ©s des plongeurs, luttaient de rapiditĂ© entre eux. Des renards marins, longs de huit pieds et douĂ©s d'une extrĂŞme finesse d'odorat, apparaissaient comme de grandes ombres bleuâtres. Des dorades, du genre spare, dont quelques-unes mesuraient jusqu'Ă  treize dĂ©cimètres, se montraient dans leur vĂŞtement d'argent et d'azur entourĂ© de bandelettes, qui tranchait sur le ton sombre de leurs nageoires, poissons consacrĂ©s Ă  VĂ©nus, et dont l'Ĺ“il est enchâssĂ© dans un sourcil d'or ; espèce prĂ©cieuse, amie de toutes les eaux, douces ou salĂ©es, habitant les fleuves, les lacs et les ocĂ©ans, vivant sous tous les climats, supportant toutes les tempĂ©ratures, et dont la race, qui remonte aux Ă©poques gĂ©ologiques de la terre, a conserve toute sa beautĂ© des premiers jours. Des esturgeons magnifiques, longs de neuf Ă  dix mètres, animaux de grande marche, heurtaient d'une queue puissante la vitre des panneaux, montrant leur dos bleuâtre Ă  petites taches brunes : ils ressemblent aux squales dont ils n'Ă©galent pas la force, et se

1 ... 38 39 40 41 42 43 44 45 46 ... 69
Go to page:

Free e-book: «Vingt mille Lieues Sous Les Mers — Complete by Jules Verne (simple ebook reader .txt) 📕»   -   read online now on website american library books (americanlibrarybooks.com)

Comments (0)

There are no comments yet. You can be the first!
Add a comment