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Read book online «Vingt Mille Lieues Sous Les Mers — Part 2 by Jules Verne (best books for 8th graders txt) 📕».   Author   -   Jules Verne



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fourrure verte d'algues et de fucus. Quel indescriptible spectacle, et quelle variĂ©tĂ© de sites et de paysages Ă  l'arasement de ces Ă©cueils et de ces Ă®lots volcaniques qui confinent Ă  la cĂ´te Iybienne ! Mais oĂą ces arborisations apparurent dans toute leur beautĂ©, ce fut vers les rives orientales que le Nautilus ne tarda pas Ă  rallier. Ce fut sur les cĂ´tes du TĂ©hama, car alors non seulement ces Ă©talages de zoophytes fleurissaient au-dessous du niveau de la mer, mais ils formaient aussi des entrelacements pittoresques qui se dĂ©roulaient Ă  dix brasses au-dessus ; ceux-ci plus capricieux, mais moins colorĂ©s que ceux-lĂ  dont l'humide vitalitĂ© des eaux entretenait la fraĂ®cheur.

Que d'heures charmantes je passai ainsi Ă  la vitre du salon ! Que d'Ă©chantillons nouveaux de la flore et de la faune sous-marine j'admirai sous l'Ă©clat de notre fanal Ă©lectrique ! Des fongies agariciformes, des actinies de couleur ardoisĂ©e, entre autres le thalassianthus aster des tubipores disposĂ©s comme des flĂ»tes et n'attendant que le souffle du dieu Pan, des coquilles particulières Ă  cette mer, qui s'Ă©tablissent dans les excavations madrĂ©poriques et dont la base est contournĂ©e en courte spirale, et enfin mille spĂ©cimens d'un polypier que je n'avais pas observĂ© encore, la vulgaire Ă©ponge.

La classe des spongiaires, première du groupe des polypes, a été précisément créée par ce curieux produit dont l'utilité est incontestable. L'éponge n'est point un végétal comme l'admettent encore quelques naturalistes, mais un animal du dernier ordre, un polypier inférieur à celui du corail. Son animalité n'est pas douteuse, et on ne peut même adopter l'opinion des anciens qui la regardaient comme un être intermédiaire entre la plante et l'animal. Je dois dire cependant, que les naturalistes ne sont pas d'accord sur le mode d'organisation de l'éponge. Pour les uns, c'est un polypier, et pour d'autres tels que M. Milne Edwards, c'est un individu isolé et unique.

La classe des spongiaires contient environ trois cents espèces qui se rencontrent dans un grand nombre de mers, et mĂŞme dans certains cours d'eau oĂą elles ont reçu le nom de « fluviatiles Â». Mais leurs eaux de prĂ©dilection sont celles de la MĂ©diterranĂ©e, de l'archipel grec, de la cĂ´te de Syrie et de la mer Rouge. LĂ  se reproduisent et se dĂ©veloppent ces Ă©ponges fines-douces dont la valeur s'Ă©lève jusqu'Ă  cent cinquante francs, l'Ă©ponge blonde de Syrie, l'Ă©ponge dure de Barbarie, etc. Mais puisque je ne pouvais espĂ©rer d'Ă©tudier ces zoophytes dans les Ă©chelles du Levant, dont nous Ă©tions sĂ©parĂ©s par l'infranchissable isthme de Suez, je me contentai de les observer dans les eaux de la mer Rouge.

J'appelai donc Conseil près de moi, pendant que le Nautilus, par une profondeur moyenne de huit à neuf mètres, rasait lentement tous ces beaux rochers de la côte orientale.

Là croissaient des éponges de toutes formes, des éponges pédiculées, foliacées, globuleuses, digitées. Elles justifiaient assez exactement ces noms de corbeilles, de calices, de quenouilles, de cornes d'élan, de pied de lion, de queue de paon, de gant de Neptune, que leur ont attribués les pêcheurs, plus poètes que les savants. De leur tissu fibreux, enduit d'une substance gélatineuse a demi fluide, s'échappaient incessamment de petits filets d'eau, qui après avoir porté la vie dans chaque cellule, en étaient expulsés par un mouvement contractile. Cette substance disparaît après la mort du polype, et se putréfie en dégageant de l'ammoniaque. Il ne reste plus alors que ces fibres cornées ou gélatineuses dont se compose l'éponge domestique, qui prend une teinte roussâtre, et qui s'emploie à des usages divers, selon son degré d'élasticité, de perméabilité ou de résistance à la macération.

Ces polypiers adhéraient aux rochers, aux coquilles des mollusques et même aux tiges d'hydrophytes. Ils garnissaient les plus petites anfractuosités, les uns s'étalant, les autres se dressant ou pendant comme des excroissances coralligènes. J'appris à Conseil que ces éponges se pêchaient de deux manières, soit à la drague, soit à la main. Cette dernière méthode qui nécessite l'emploi des plongeurs, est préférable, car en respectant le tissu du polypier, elle lui laisse une valeur très supérieure.

Les autres zoophytes qui pullulaient auprès des spongiaires, consistaient principalement en mĂ©duses d'une espèce très Ă©lĂ©gante ; les mollusques Ă©taient reprĂ©sentĂ©s par des variĂ©tĂ©s de calmars, qui, d'après d'Orbigny, sont spĂ©ciales Ă  la mer Rouge, et les reptiles par des tortues virgata, appartenant au genre des chĂ©lonĂ©es, qui fournirent Ă  notre table un mets sain et dĂ©licat.

Quant aux poissons, ils Ă©taient nombreux et souvent remarquables. Voici ceux que les filets du Nautilus rapportaient plus frĂ©quemment Ă  bord : des raies, parmi lesquelles les limmes de forme ovale, de couleur brique, au corps semĂ© d'inĂ©gales taches bleues et reconnaissables Ă  leur double aiguillon dentelĂ©, des arnacks au dos argentĂ©, des pastenaques Ă  la queue pointillĂ©e, et des bockats, vastes manteaux longs de deux mètres qui ondulaient entre les eaux, des aodons, absolument dĂ©pourvus de dents, sortes de cartilagineux qui se rapprochent du squale, des ostracions-dromadaires dont la bosse se termine par un aiguillon recourbĂ©, long d'un pied et demi, des ophidies, vĂ©ritables murènes Ă  la queue argentĂ©e, au dos bleuâtre, aux pectorales brunes bordĂ©es d'un lisĂ©rĂ© gris, des fiatoles, espèces de stromatĂ©es, zĂ©brĂ©s d'Ă©troites raies d'or et parĂ©s des trois couleurs de la France, des blĂ©mies-garamits, longs de quatre dĂ©cimètres, de superbes caranx, dĂ©corĂ©s de sept bandes transversales d'un beau noir, de nageoires bleues et jaunes, et d'Ă©cailles d'or et d'argent, des centropodes, des mulles auriflammes Ă  tĂŞte jaune, des scares, des labres, des balistes, des gobies, etc., et mille autres poissons communs aux OcĂ©ans que nous avions dĂ©jĂ  traversĂ©s.

Le 9 février, le Nautilus flottait dans cette partie la plus large de la mer Rouge, qui est comprise entre Souakin sur la côte ouest et Quonfodah sur la côte est, sur un diamètre de cent quatre-vingt-dix milles.

Ce jour-lĂ  Ă  midi, après le point, le capitaine Nemo monta sur la plate-forme oĂą je me trouvai. Je me promis de ne point le laisser redescendre sans l'avoir au moins pressenti sur ses projets ultĂ©rieurs. Il vint Ă  moi dès qu'il m'aperçut, m'offrit gracieusement un cigare et me dit :

« Eh bien ! monsieur le professeur, cette mer Rouge vous plaĂ®t-elle ? Avez-vous suffisamment observĂ© les merveilles qu'elle recouvre, ses poissons et ses zoophytes, ses parterres d'Ă©ponges et ses forĂŞts de corail ? Avez-vous entrevu les villes jetĂ©es sur ses bords ?

— Oui, capitaine Nemo, rĂ©pondis-je, et le Nautilus s'est merveilleusement prĂŞtĂ© Ă  toute cette Ă©tude. Ah ! c'est un intelligent bateau !

— Oui, monsieur, intelligent, audacieux et invulnĂ©rable ! Il ne redoute ni les terribles tempĂŞtes de la mer Rouge, ni ses courants, ni ses Ă©cueils.

— En effet, dis-je, cette mer est citée entre les plus mauvaises, et si je ne me trompe, au temps des Anciens, sa renommée était détestable.

— DĂ©testable, monsieur Aronnax. Les historiens grecs et latins n'en parlent pas Ă  son avantage, et Strabon dit qu'elle est particulièrement dure Ă  l'Ă©poque des vents EtĂ©siens et de la saison des pluies. L'Arabe Edrisi qui la dĂ©peint sous le nom de golfe de Colzoum raconte que les navires pĂ©rissaient en grand nombre sur ses bancs de sable, et que personne ne se hasardait Ă  y naviguer la nuit. C'est, prĂ©tend-il, une mer sujette Ă  d'affreux ouragans, semĂ©e d'Ă®les inhospitalières, et « qui n'offre rien de bon Â» ni dans ses profondeurs, ni Ă  sa surface. En effet, telle est l'opinion qui se trouve dans Arrien, Agatharchide et ArtĂ©midore.

— On voit bien, répliquai-je, que ces historiens n'ont pas navigué à bord du Nautilus.

— En effet, rĂ©pondit en souriant le capitaine, et sous ce rapport, les modernes ne sont pas plus avancĂ©s que les anciens. Il a fallu bien des siècles pour trouver la puissance mĂ©canique de la vapeur ! Qui sait si dans cent ans, on verra un second Nautilus ! Les progrès sont lents, monsieur Aronnax.

— C'est vrai, rĂ©pondis-je, votre navire avance d'un siècle, de plusieurs peut-ĂŞtre, sur son Ă©poque. Quel malheur qu'un secret pareil doive mourir avec son inventeur ! Â»

Le capitaine Nemo ne me rĂ©pondit pas. Après quelques minutes de silence :

« Vous me parliez, dit-il, de l'opinion des anciens historiens sur les dangers qu'offre la navigation de la mer Rouge ?

— C'est vrai, rĂ©pondis-je, mais leurs craintes n'Ă©taient-elles pas exagĂ©rĂ©es ?

— Oui et non, monsieur Aronnax, me rĂ©pondit le capitaine Nemo, qui me parut possĂ©der Ă  fond « sa mer Rouge Â». Ce qui n'est plus dangereux pour un navire moderne, bien grĂ©Ă©, solidement construit, maĂ®tre de sa direction grâce Ă  l'obĂ©issante vapeur, offrait des pĂ©rils de toutes sortes aux bâtiments des anciens. Il faut se reprĂ©senter ces premiers navigateurs s'aventurant sur des barques faites de planches cousues avec des cordes de palmier, calfatĂ©es de rĂ©sine pilĂ©e et enduites de graisse de chiens de mer. Ils n'avaient pas mĂŞme d'instruments pour relever leur direction, et ils marchaient Ă  l'estime au milieu de courants qu'ils connaissaient Ă  peine. Dans ces conditions, les naufrages Ă©taient et devaient ĂŞtre nombreux. Mais de notre temps, les steamers qui font le service entre Suez et les mers du Sud n'ont plus rien Ă  redouter des colères de ce golfe, en dĂ©pit des moussons contraires. Leurs capitaines et leurs passagers ne se prĂ©parent pas au dĂ©part par des sacrifices propitiatoires, et, au retour, ils ne vont plus, ornĂ©s de guirlandes et de bandelettes dorĂ©es, remercier les dieux dans le temple voisin.

— J'en conviens, dis-je, et la vapeur me paraĂ®t avoir tuĂ© la reconnaissance dans le coeur des marins. Mais capitaine, puisque vous semblez avoir spĂ©cialement Ă©tudiĂ© cette mer, pouvez-vous m'apprendre quelle est l'origine de son nom ?

— Il existe, monsieur Aronnax, de nombreuses explications Ă  ce sujet. Voulez-vous connaĂ®tre l'opinion d'un chroniqueur du XIVe siècle ?

— Volontiers.

— Ce fantaisiste prĂ©tend que son nom lui fut donnĂ© après le passage des IsraĂ©lites, lorsque le Pharaon eut pĂ©ri dans les flots qui se refermèrent Ă  la voix de MoĂŻse :

En signe de cette merveille,
Devint la mer rouge et vermeille.
Non puis ne surent la nommer
Autrement que la rouge mer.

— Explication de poète, capitaine Nemo, répondis-je, mais je ne saurais m'en contenter. Je vous demanderai donc votre opinion personnelle.

— La voici. Suivant moi, monsieur Aronnax, il faut voir dans cette appellation de mer Rouge une traduction du mot hĂ©breu « Edrom Â», et si les anciens lui donnèrent ce nom, ce fut Ă  cause de la coloration particulière de ses eaux.

— Jusqu'ici cependant je n'ai vu que des flots limpides et sans aucune teinte particulière.

— Sans doute, mais en avançant vers le fond du golfe, vous remarquerez cette singulière apparence. Je me rappelle avoir vu la baie de Tor entièrement rouge, comme un lac de sang.

— Et cette couleur, vous l'attribuez Ă  la prĂ©sence d'une algue microscopique ?

— Oui. C'est une matière mucilagineuse pourpre produite par ces chétives plantules connues sous le nom de trichodesmies, et dont il faut quarante mille pour occuper l'espace d'un millimètre carré. Peut-être en rencontrerez-vous, quand nous serons à Tor.

— Ainsi, capitaine Nemo, ce n'est pas la première fois que vous parcourez la mer Rouge Ă  bord du Nautilus ?

— Non, monsieur.

— Alors, puisque vous parliez plus haut du passage des IsraĂ©lites et de la catastrophe des Égyptiens, je vous demanderai si vous avez reconnu sous les eaux des traces de ce grand fait historique ?

— Non, monsieur le professeur, et cela pour une excellente raison.

— Laquelle ?

— C'est que l'endroit même où Moïse a passé avec tout son peuple est tellement ensablé maintenant que les chameaux y peuvent à peine baigner leurs jambes. Vous comprenez que mon Nautilus n'aurait pas assez d'eau pour lui.

— Et cet endroit ?... demandai-je.

— Cet endroit est situé un peu au-dessus de Suez, dans ce bras qui formait autrefois un profond estuaire, alors que la mer Rouge s'étendait jusqu'aux lacs amers. Maintenant, que ce passage soit miraculeux ou non, les Israélites n'en ont pas moins passé là pour gagner la Terre promise, et l'armée de Pharaon a précisément péri en cet endroit. Je pense donc que des fouilles pratiquées au milieu de ces sables mettraient à découvert une grande quantité d'armes et d'instruments d'origine égyptienne.

— C'est évident, répondis-je, et il faut espérer pour les archéologues que ces fouilles se feront tôt ou tard, lorsque des villes nouvelles s'établiront sur cet isthme, après le percement du canal de Suez. Un canal bien inutile pour

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