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Volume 1 Title 1 (Portraits Littéraires, Tome 3) pg 1

 

La Première Édition De Ce Volume, Qui Parut D'abord En Décembre 1851,

Avait En Tête Cet Avertissement:

 

«Ce Volume, Que J'intitule _Derniers Portraits_, Non Parce Que J'ai

Décidé De N'en Plus Faire, Mais Parce Qu'il Se Compose Des Dernières

Études De Ce Genre Auxquelles J'ai Pris Plaisir Avant Février 1848,

Sert De Complément Aux Six Volumes De _Portraits_ Déjà Publiés Chez M.

Didier. Il S'y Rapporte Par Le Ton Et Par Les Sujets: J'y Touche Aux

Anciens, Je M'arrête Un Instant Au Seizième Siècle, Je Me Complais Au

Dix-Septième, Et Nos Contemporains Ont Aussi Leur Part. Si L'on Rangeait

Un Jour Mes _Portraits_ Dans Un Ordre Méthodique, Ce Volume Fournirait

Son Contingent À Chacune Des Branches Dans Lesquelles Je Me Suis

Essayé.»

 

Aujourd'hui, En Réimprimant Ce Volume Dans La Collection Acquise Par Mm.

Garnier, J'en Fais Le Tome Iii Des _Portraits Littéraires_, Auxquels Il

Se Rapporte En Effet Par La Plus Grande Partie De Son Contenu.

 

Décembre 1862.

 

 

 

Théocrite

 

I

 

La Poésie Grecque, Qui Commence Avec Homère, Et Qui Ouvre Par Lui Sa

Longue Période De Gloire, Semble La Clore Avec Théocrite; Elle Se Trouve

Ainsi Comme Encadrée Entre La Grandeur Et La Grâce, Et Celle-Ci, Pour En

Être À Faire Les Honneurs De La Sortie, N'a Rien Perdu De Son Entière Et

Suprême Fraîcheur. Elle N'a Jamais Paru Plus Jeune, Et A Rassemblé Une

Dernière Fois Tous Ses Dons. Après Théocrite, Il Y Aura Encore En Grèce

D'agréables Poëtes; Il N'y En Aura Plus De Grands. «La Lie Même De La

Littérature Des Grecs Dans Sa Vieillesse Offre Un Résidu Délicat;» C'est

Ce Qu'on Peut Dire Avec M. Joubert Des Poëtes D'anthologie Qui Suivent.

Mais Théocrite Appartient Encore À La Grande Famille; Il En Est Par

Son Originalité, Par Son Éclat, Par La Douceur Et La Largeur De Ses

Pinceaux. Les Suffrages De La Postérité L'ont Constamment Maintenu À Son

Rang, Et Rien Ne L'en A Pu Faire Descendre. A Un Certain Moment, Les

Mêmes Gens D'esprit Qui S'attaquaient À Homère Se Sont Attaqués À

Théocrite. Tandis Que Perrault Prenait À Partie L'_Iliade_, Fontenelle

Faisait Le Procès Aux _Idylles_; Il N'y A Pas Mieux Réussi. C'est

Toujours Un Étonnement Pour Moi, Je L'avoue, De Voir Qu'un Esprit Aussi

Supérieur Que Fontenelle N'ait Pas Mieux Compris, Tout Berger Normand

Qu'il Était, Qu'en Ce Parallèle Des Anciens Et Des Modernes Il Y Avait

Des Genres Dans Lesquels Les Anciens Devaient Presque Nécessairement

Avoir La Prééminence, Quelle Que Fût La Revanche Des Modernes Sur

D'autres Points. Lui Qui A Si Ingénieusement Et Si Justement Comparé La

Suite Des Âges Et Des Siècles À La Vie D'un Seul Homme, Lequel, Existant

Depuis Le Commencement Du Monde Jusqu'à Présent, Aurait Eu Son Enfance,

Sa Jeunesse, Sa Maturité, Comment N'a-T-Il Pas Reconnu Que Cet Âge De

Jeunesse Qu'il Rejetait Dans Le Passé Était En Effet Le Plus Propre À Un

Certain Épanouissement Naturel Et Riant, Dont L'à-Propos Ne Se Retrouve

Plus? Un Vieux Poëte Du Seizième Siècle (Pontus De Thyard), Ayant À

Définir Les Grâces, L'a Fait En Des Termes Qui Reviennent Singulièrement

Volume 1 Title 1 (Portraits Littéraires, Tome 3) pg 2

À Ma Pensée: «Des Trois Grâces, Dit-Il, La Première Étoit Nommée

_Aglaé_, La Seconde _Thalie_, Et La Tierce, _Euphrosyne_. _Aglaé_

Signifie _Splendeur_, Qu'il Faut Entendre Pour Celle Grâce D'entendement

Qui Consiste Au Lustre De Vérité Et De Vertu. _Thalie_ Signifie La

_Verde, Agréable Et Gentille Beauté_: À Savoir Celle Des Linéaments Bien

Conduits Et Des Traits, Desquels La Verde Jeunesse Est Coutumière De

Plaire. _Euphrosyne_ Est La _Joie_ Que Nous Cause La Pure Délectation De

La Voix Musicale Et Harmonieuse.» Sans Insister Sur Les Distinctions

Un Peu Platoniques Du Vieil Auteur, Il Me Suffit Des Traductions Vives

Qu'il Emploie Pour Éclairer La Discussion Même. Car Cette _Thalie_,

Comme Il L'appelle, Cette _Verte Et Agréable Beauté_ De La Muse

Pastorale, À Quel Âge Du Monde Ira-T-On La Demander, Si Ce N'est À Sa

Jeunesse? Et Théocrite Nous Représente Bien Cette Jeunesse Finissante,

Qui Se Retourne Une Dernière Fois Et Ressaisit Comme D'un Coup D'oeil

Tous Ses Charmes Avant De S'en Détacher. Fontenelle A Beau Définir La

Maturité Actuelle Du Monde Une Virilité _Sans Vieillesse_, Et Dans

Laquelle L'homme Sera Toujours Également Capable Des Choses Auxquelles

Sa Jeunesse Était Propre, Il Est Bien Clair Que Cette Capacité

S'applique Peu Aux Sentiments, Et Que Rien De Tout Ce Qu'il Y A De

Solide Ou De Raffiné Dans L'homme Moderne Ne Saurait Lui Rendre Une

Certaine Fleur. Ajoutons Que, Tout En Faisant La Guerre À Théocrite

Contre Ceux Qu'il Appelait Les Savants, Et Qui, Dans Ce Cas-Ci,

N'étaient Pas Autres Que Les Gens De Goût, Fontenelle Lui-Même Semble

Reconnaître Son Impuissance, Et Il Rend Les Armes Lorsqu'il Dit: «Quoi

Qu'il En Soit, Je Vois Que Toute Leur Faveur Est Pour Théocrite, Et

Qu'ils Ont Résolu Qu'il Serait Le Prince Des Poëtes Bucoliques.» Ils

L'ont Résolu En Effet, Et, Comme Quiconque Remonte Sincèrement À La

Source Est Aussitôt De Leur Sentiment, L'arrêt Toujours Rajeuni Ne

Saurait Manquer De Vivre[1].

 

L'idylle N'est Pas Un Genre Qui Puisse Indifféremment Venir En Tout

Temps Et Partout; Il Y Faut Une Part De Naturel, Même Quand L'art Doit

S'en Mêler. Théocrite N'était Plus Sans Doute Dans Cet État D'innocence

Et De Naïveté Dont Il Nous A Reproduit Plus D'un Tableau; Il Venait À La

Fin D'une Littérature Très-Cultivée; Il Vivait, Dit-On, À La Cour Des

Rois. Pourtant, Dans Cette Sicile Heureuse, Bien Que Tant De Fois

Bouleversée, Il Avait Été Témoin D'une Vie Réellement Pastorale; Il

Avait, Dans Sa Jeunesse, Entendu De Vrais Chants Qu'accompagnait La

Flûte De Vrais Bergers, Et Il N'en Fallut Pas Davantage À Son Génie

Inventif Pour Saisir L'occasion D'une Poésie Neuve. Théocrite Était,

Par Rapport Aux Choses Qu'il Représentait, Dans Cette Condition De

_Demi-Vérité_ Qui Est Peut-Être La Plus Favorable À L'imagination.

Celle-Ci Alors, En Effet, A De Quoi S'appuyer Et À La Fois De Quoi Jouer

Librement; Elle Atteint Au Réel, Et Tour À Tour Se Tient À Distance;

Elle Serre De Près Le Détail, Et Elle Met À L'ensemble La Perspective.

Ainsi L'on Peut Se Figurer Le Poëte Syracusain Copiant, Inventant Avec

Mesure, Usant Des Beaux Cadres Tout Trouvés Que Lui Fournissaient Le

Paysage Et L'horizon Des Mers, Attentif Aux Moindres Motifs Rustiques,

Sachant Les Combiner Et Les Achever, Même Lorsqu'il N'a L'air Que De Les

Redire. De La Sorte Il Put Plaire Diversement À Ceux De Sicile Et À Ceux

D'alexandrie, Demeurer Vrai Pour Les Uns Et Paraître Tout Nouveau Aux

Autres. En France, L'idylle Bucolique, Est-Il Besoin De Le Remarquer?

Fut Toute Factice Et Artificielle; Elle N'eut Pied Nulle Part: Nous

N'avons Pas De Bergers, De Bergers Qui Chantent. Les Romains Eux-Mêmes,

Si L'on Excepte La Grande Grèce, Ne Paraissent Guère Avoir Été Enclins

À Cette Branche De Poésie; Et Lorsque Virgile L'importa Chez Eux, Ce Ne

Fut Pas Sans Quelques-Uns Des Inconvénients Bien Sensibles D'un Genre

Déjà Artificiel. Les Vieux Romains Étaient Rustiques Et Amateurs De La

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Campagne; Mais Ils L'étaient En Agriculteurs, Non En Bergers. Les Curius

Et Les Camille Tenaient La Main À La Charrue. Or, La Charrue Va Mal Avec

La Flûte; Les Doigts Qui Ont Le Cal Ne Sont Pas Légers. Lorsqu'il Arrive

Une Fois À Théocrite D'introduire Un Moissonneur Amoureux, Il A Soin De

Nous Montrer Son Camarade Qui Le Raille D'importance; Et, À La Chanson

Langoureuse Du Premier, Le Vaillant Compagnon Oppose Des Couplets À

Cérès Pleins De Vigueur Et De Préceptes, Et Capables De Réjouir Le Coeur

De Caton L'ancien. Voilà Quelle Eût Été Tout Au Plus L'idylle Naturelle

Des Romains. Mais, À Quoi Bon La Chercher Ailleurs? Leur Véritable

Idylle Originale, Nous La Possédons; Ce Sont Proprement Les

_Géorgiques_. Cette Admirable Terminaison Du Chant Second, Qui Exprime

La Vie Des Antiques Sabins, Leur Labeur Opiniâtre Durant L'année, Leurs

Jeux Aux Jours De Fête, Jeux Rudes Encore Et Aguerrissants:

 

  Corporaque Agresti Nudant Praedura Palaestra;

 

Telle Est La Franche Nature Romaine Primitive Dans Tout Son Contraste

Avec Les Loisirs Et Les Passe-Temps Gracieux Des Chevriers De Sicile.

Quoique Théocrite Ait Certainement Embelli Ses Sujets, Il Travaillait En

Quelque Sorte Sur Une Matière Plus Fine, Plus Déliée, Et Qui Prêtait Du

Moins À Cette Mise En Oeuvre. Ce Daphnis Qu'il Célèbre Sans Cesse, Et

Qui Apparaît Comme L'inventeur À Demi Divin Du Criant Bucolique, Nous

Figure Le Génie Même D'une Race Douée De Légèreté, D'allégresse Et De

Mélodie. Il N'y Eut Pas Ombre De Daphnis À L'entour De Cincinnatus. Il

Semble Plutôt Que L'antique Esprit D'hésiode, Esprit Grave, Religieux,

Positif, Tout Nourri De Bon Sens Et D'apologues, Ait Passé De Bonne

Heure Dans La Forte Étrurie, Et Que De Ce Côté Il Ait Fait Longtemps La

Seule Part De Poétique Héritage.

 

[Note 1: Voltaire, Avec Sa Promptitude De Goût, Ne S'y Est Pas

Trompé, Et Il Dit Dans Une Lettre: «Ce Théocrite, À Mon Sens, Était

Supérieur À Virgile En Fait D'églogue.»]

 

On Sait Peu De Chose De La Vie De Théocrite. Il Était Né À Syracuse. On

Calcule Que La Date De Sa Naissance Peut Tomber Vers L'année 300 Ou 305

Avant Jésus-Christ. Il Alla, Jeune, Étudier Dans L'île De Cos, Sous

L'illustre Poëte Philétas, Qui, Tout L'indique, Était Dans L'élégie Ce

Que Théocrite Est Devenu Dans L'idylle, Et Qui Tenait La Palme Entre

Tous. Auprès De Philétas Étudiait Aussi Le Fils De Ptolémée Lagus, Qui

Allait Régner Bientôt Sous Le Nom De Philadelphe. Il Était Du Même Âge

Que Théocrite, Et Un Peu Plus Jeune Peut-Être. Y Eut-Il Là Entre Le

Jeune Prince Et Le Poëte Une De Ces Confraternités D'études Aussi

Puissantes Dans L'antiquité Que Dans Les Temps Modernes? M. Adert, Dans

Une Thèse Sur Théocrite, Que J'ai Sous Les Yeux, L'a Ingénieusement

Conjecturé, Et A Fait Valoir Ces Circonstances. Au Sortir De Là, On Perd

De Vue Le Poëte. Alla-T-Il Tout D'abord À Alexandrie, Comme De Doctes

Éditeurs L'ont Pensé? On Voit Qu'à Un Certain Moment, Revenu En Sicile,

Il Songea Pour Sa Fortune À Se Tourner Vers Hiéron De Syracuse. La Pièce

Qui Porte Cette Adresse, Très-Belle, Mais Assez Amère, Et Où Il Exprime

Ses Plaintes Encore Plus Que Ses Espérances, Semble Prouver Qu'il

N'avait Guère Prospéré Dans L'intervalle, Et Que La Confraternité

D'études Avec Ptolémée Philadelphe Ne Lui Avait Pas Beaucoup Profité.

En Tira-T-Il Meilleur Parti Plus Tard, Lorsqu'il Alla Ou Retourna À

Alexandrie? Est-Il Même Besoin De Supposer Qu'il Y Retourna, Si L'on

Admet Qu'il Y Était Déjà Allé Au Sortir De L'île De Cos? On N'a Sur Tout

Cela Que Des Conjectures Déduites À Grand-Peine De Quelques Passages De

Ses Vers, Et Sur Lesquelles Les Critiques Sont Loin De Tomber D'accord.

Sortons Vite De Ce Dédale, Qui N'est Pas Fait Pour Nous. Les Poésies

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